L'enseignement moral et civique (EMC)

le voyage d'Ulysse raconté par les élèves de 6° (feuilleton sonore), le Petit chaperon rouge, Nouvelles aventures de Renart : des aventures imaginées par les élèves de Cinquième, lecture de l'image, Jean Fouquet et l'art de l'enluminure etc.

L'enseignement moral et civique (EMC)

Messagepar locipompeiani » 11 Août 2015, 08:32

L’enseignement moral et civique (EMC) a été créé par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République du 8 juillet 2013. Ce nouvel enseignement est mis en œuvre dans toutes les classes de l’école au lycée à compter de la rentrée 2015.

Il constitue "la colonne vertébrale" du PARCOURS CITOYEN

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Il se substitue aux programmes d’éducation civique existant pour chacun des niveaux de l’école élémentaire, du collège et du lycée, c'est à dire à :
•l'instruction civique et morale à l’école élémentaire,
•l'éducation civique au collège,
•l'enseignement civique, juridique et social (ECJS) dans les classes de seconde générale et technologique et les classes du cycle terminal des séries générales,
•l'éducation civique, au sein du programme d’histoire-géographie-éducation civique dans le cycle terminal des séries technologiques,
•l'éducation civique au lycée professionnel et dans les classes préparatoires au certificat d’aptitude professionnelle (CAP).

Il est mis en place dans les classes terminales des séries technologiques STI2D, STL et STD2A.


L’EMC doit transmettre un socle de valeurs communes : la dignité, la liberté, l’égalité, la solidarité, la laïcité, l’esprit de justice, le respect de la personne, l’égalité entre les femmes et les hommes, la tolérance et l’absence de toute forme de discrimination. Il doit développer le sens moral et l’esprit critique et permettre à l’élève d’apprendre à adopter un comportement réfléchi. Il prépare à l’exercice de la citoyenneté et sensibilise à la responsabilité individuelle et collective.


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Programme d’enseignement moral et civique

Messagepar locipompeiani » 11 Août 2015, 16:15

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Les défis de l’enseignement

Messagepar locipompeiani » 05 Septembre 2015, 17:35

Permis de penser par Laure Adler le samedi à 13h20 sur France Inter

Les défis de l’enseignement
Avec Fabien Truong, Professeur de sociologie à l'Université Paris 8 où il est responsable du Master de formation des futurs enseignants. Professeur également à Sciences-Po.

Fabien Truong a enseigné pendant six années l'économie dans des lycées en Seine Saint Denis.

Auteur de Des hommes et des capuches, editions Buchet-Chastel (2014)

A paraitre le 24 septembre aux Editions La Découverte: Jeunesses françaises. Bac +5 Made in banlieue

François-Xavier Bellamy, Professeur de philisophie à Paris. Maire adjoint à Versailles.

Auteur de Les déshérités ou l'urgence de transmettre. Editions Plon (2014)

Une émission intéressante sur la manière dont on a lu Pierre Bourdieu et sur les missions de l’école.
Transmettre et enseigner: quel sens y mettent les enseignants? D'où vient leur déclassement? De quelle façon la relation pédagogique a-t-elle évolué?
Comment construire une relation pédagogique sereine ?
L’après Charlie : réactions à la minute de silence, le vivre ensemble
L’enseignement de la morale : des injonctions contradictoires
La transmission de la morale commence-t-elle par le savoir ?
L’autorité éducative comme source de violence pour les élèves ?


Est évoquée la sortie le 7 octobre 2015 du film de Philippe Faucon, Fatima


Fatima vit seule avec ses deux filles : Souad, 15 ans, adolescente en révolte, et Nesrine, 18 ans, qui commence des études de médecine. Fatima maîtrise mal le français et le vit comme une frustration dans ses rapports quotidiens avec ses filles. Toutes deux sont son moteur, sa fierté, son inquiétude aussi. Afin de leur offrir le meilleur avenir possible, Fatima travaille comme femme de ménage avec des horaires décalés. Un jour, elle chute dans un escalier. En arrêt de travail, Fatima se met à écrire en arabe ce qu'il ne lui a pas été possible de dire jusque-là en français à ses filles.
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Re: L'enseignement moral et civique (EMC)

Messagepar locipompeiani » 11 Septembre 2015, 14:08

Philippe Meirieu profite de la mise en place de l'Enseignement moral et civique pour interroger le succès commercial des ouvrages de "développement personnel", signe du triomphe de l’individualisme dans une période chargée de menaces.

Il en vient à définir la morale authentique comme la construction d’un « nous » à faire advenir.

Philippe Meirieu a écrit:

De l’enseignement de la morale dans l’individualisme contemporain…

Comme à chaque rentrée, je fais le tour des principales librairies de Lyon, où je réside, afin de voir le poids et la nature des publications pédagogiques et sur l’école. Certes, je sais qu’aujourd’hui une grande partie des ventes d’ouvrages s’effectue par correspondance et que la plupart des libraires, soumis à la dure loi des diffuseurs, ne font entrer que des livres dont la vente est assurée à court terme. Mais, néanmoins - rentrée des classes oblige ! - beaucoup se faisaient traditionnellement un devoir de présenter quelques livres pédagogiques en bonne place. Ainsi voyait-on, encore, il y a quelques années, côte à côte, quelques pamphlets « anti-pédagos », quelques témoignages d’enseignants ou de chefs d’établissement et, même, des ouvrages de réflexion à partir d’innovations ou de recherches, voire des outils pour aider les enseignants à mieux comprendre ce qui se passe dans l’école et agir pour une transmission plus juste et efficace…

Quand la pédagogie passe à la trappe, le « développement personnel » triomphe

Or, cette année, plus encore que les années précédentes, j’ai eu toutes les peines du monde à repérer le « coin pédagogie » dans les librairies : réduit le plus souvent à un petit rayon derrière un pilier, il s’était atrophié au-delà de toutes mes craintes. Une fois déniché, je n’y ai trouvé, outre un ou deux « classiques » - essentiellement Maria Montessori qui revient étrangement sur le devant de la scène pédagogique -, que des livres permettant aux étudiants de préparer le concours de professeur des écoles, des manuels destinés aux parents pour enseigner eux-mêmes à leurs enfants la grammaire et l’arithmétique… et quelques invendus des années précédentes qui semblaient comme égarés au milieu de toute cette littérature étroitement utilitariste.

J’exagère : il y avait, bien sûr, au rayon des nouveautés et meilleures ventes, le livre d’Alain Juppé et, parfois, celui de François Dubet et Marie-Duru Bellat ; mais il m’a été particulièrement difficile de trouver des ouvrages, pourtant parus récemment, de la Chronique sociale (éditeur courageux et militant), des éditions De Boeck, d’ESF, de Retz ou, même, de Nathan… Et je n’évoque même pas les éditions CANOPE (ex CNDP), qui publient des textes intéressants, mais qu’il est quasiment impossible d’acquérir sans passer par son propre réseau.

On me dira que tout cela n’est pas grave puisque les personnes intéressées pourront trouver ces ouvrages sur Internet : mais c’est oublier qu’on ne trouve sur Internet que ce dont on connaît déjà plus ou moins l’existence et que l’on achète plus volontiers un livre que l’on peut feuilleter. On me dira qu’il existe les réseaux sociaux pour faire connaître des publications importantes, mais c’est oublier que ces réseaux sociaux ne touchent, pour l’essentiel, que les personnes déjà mobilisées et souvent convaincues… pendant que la formation continue – qui était l’occasion pour beaucoup d’enseignants de découvrir la culture pédagogique – continue à être la grande laissée pour compte de la « refondation »…

Conséquence : beaucoup d’enseignants continuent à se « prolétariser » à leur insu et ne rencontrent plus la culture pédagogique – réduite à quelques ersatzs- qu’à travers les « instructions officielles » et la « communication verticale » des « conférences pédagogiques » ! Conséquence : les débats internes de l’Éducation nationale rabattent toutes les questions pédagogiques sur des conflits institutionnels et peinent à les articuler avec l’histoire et l’actualité des recherches pédagogiques : ainsi, on ne discute « évaluation », « interdisciplinarité », « rythmes scolaires », « relations avec les familles » que sous l’angle de la « tuyauterie » et de « l’intendance »… ce qui, évidemment, est loin d’être méprisable, mais ne prend sens qu’à travers le choix des finalités qu’on poursuit et des médiations qui permettent de les atteindre. Conséquence encore : faute de références communes, les enseignants peinent à construire de véritables collectifs et souffrent de solitude, quand ils ne s’enferment pas, à leur corps défendant, dans l’individualisme.

D’autant plus que s’ils peinent, en entrant dans une librairie, à trouver le rayon « pédagogie », ils n’ont aucun mal à consulter le gigantesque rayon « développement personnel » qui prend aujourd’hui une place considérable. « Etre soi-même » y est le maître-mot et, pour cela, on vous propose de « dominer votre stress », bien sûr, mais aussi de « retrouver votre calme intérieur et votre estime de soi », de vous « débrouiller pour avoir la paix » en évitant de « penser trop », en apprenant à « gérer les personnes toxiques » et en vous « détachant de tous vos soucis », de « développer votre créativité amoureuse » en utilisant « l’enseignement des Toltèques », de « prendre soin de vous » en « écartant les importuns » et en « habitant votre corps » selon les préceptes des maîtres zen, etc. On trouve même, dans ce bazar idéologique, des ouvrages qui se piquent d’éducation comme « Les sept lois pour guider votre enfant sur la voie du succès », « Tu seras un leader ma fille », « Je gère les émotions de mes enfants », « Il sera meilleur que les autres grâce à vous », « Donner des ailes à vos enfants », etc.

Tout n’est pas stupide, d’ailleurs, dans ces ouvrages et, en les feuilletant, j’y ai trouvé, parfois, une remarque pertinente, une reformulation à peu près exacte d’une proposition pédagogique intéressante vieille de plus d’une centaine d’années, mais toujours d’actualité : cela n’est pas inutile… On ne peut pas négliger, non plus, l’effet placebo de cette « littérature » : nul doute qu’elle contribue à apaiser certains éducateurs, parents et enseignants, qui se trouvent ainsi plus en mesure de faire face à leurs difficultés… Mais son hégémonie est un signe particulièrement inquiétant : elle manifeste avec éclat le triomphe de l’individualisme et du « sauve qui peut ».

Il y a, en effet, de sérieuses raisons de s’inquiéter pour notre « collectif » : le quotidien de plus en plus de nos concitoyens est extrêmement difficile et les plonge dans le désespoir et la colère ; la situation politique française n’a jamais été aussi instable et inquiétante depuis très longtemps ; des problèmes géopolitiques d’une gravité extrême se développent sous nos yeux tous les jours ; l’avenir de la planète est menacé par un pillage systématique auquel notre lâcheté ne permet pas de mettre fin… Face à tout cela, chacune et chacun est tenté de « jouer sa carte » : tirer son épingle du jeu, tant bien que mal… survivre, sans trop déprimer, dans des situations personnelles et professionnelles de plus en plus dures… sauver sa progéniture en la mettant à l’abri des mauvaises fréquentations et en lui fournissant toutes les potions possibles pour qu’elle soit parmi les « gagnants »… Tentations individualistes légitimes aux yeux des intéressés, mais tentation mortifère pour nous tous, notre société, notre école, notre avenir.

La morale ou le « penser à l’autre »

C’est pourquoi je crois plus que jamais utile l’enseignement de la morale et du civisme comme antidote au « chacun pour soi ». J’y crois essentiellement, évidemment, à travers le témoignage que donne l’école et les adultes en général : à nous de montrer que « le penser à l’autre » dont parle si bien Emmanuel Lévinas, aussi difficile soit-il à mettre en œuvre, pour nous qui sommes toujours tentés par « le repli sur soi jusque dans les confinements infra-atomiques », est ce qui « fait lien », ce qui rend possible le « nous » quand triomphe le « jeu des je ».

J’emprunte ici un récit à Roger-Pol Droit, dans le beau petit livre qu’il vient de faire paraître « Qu’est-ce qui nous unit ? » (1) : « Un enfant joue. Insouciant, inconscient du danger. Il faut l’imaginer très jeune, encore maladroit dans ses mouvements. Il joue sur la margelle d’un puits. Est-il parvenu à y grimper seul ? En s’aidant d’une pierre, d’un meuble ? Peu importe. Il y est. Le puits est profond, on n’en voit pas le fond. Un faux pas, un mauvais geste, la tête qui se penche… L’enfant risque de se précipiter, d’un coup, vers la mort certaine. Un passant, un inconnu, anonyme, par hasard, voit la scène. Il se précipite, agrippe l’enfant, le pose au sol, le sauve. C’est tout. Cette très brève histoire ne dit rien d’autre. »

Mais elle dit beaucoup, en réalité. Et, en particulier, que le « penser à l’autre » est inconditionnel, comme le montre bien Vladimir Jankélévitch dans « Le paradoxe de la morale » : que nous l’assortissions d’une seule condition et il devient dérisoire, il abolit la possibilité même de toute morale. Quelle morale serait, en effet, possible, si le passant s’était demandé : « Ce garçon est-il de ma communauté ? Ne dois-je pas blâmer d’abord ses parents ? Et, puis, n’a-t-il pas été imprudent ? Il n’a pas dû écouter les leçons de ses maîtres… Il leur a peut-être, même, délibérément désobéi ! » Non, la morale authentique, c’est celle qui institue un « nous ». Pas un « nous » qui existe déjà, mais un « nous » qu’elle fait exister. Un « nous » contagieux à l’universalité volontariste et modeste à la fois. Un « nous » que chaque enseignante et chaque enseignante doit faire exister, concrètement, au quotidien.

Et puis, bien sûr, la morale doit être « formalisée ». Mais pas sous forme de « maximes » - « Bien mal acquis ne profite jamais ! » - désormais ridicules aux yeux des enfants eux-mêmes qui les voient démenties en permanence sous leurs yeux. Non, l’enseignement de la morale passe par la réflexion, les échanges, le travail sur l’anticipation, les conséquences de ce qu’on projette de faire, la préfiguration d’un monde où tel ou tel comportement serait généralisé. À la question « qu’est-ce qui nous unit ? », Roger-Pol Droit répond, en conclusion de son livre : le fait que nous sommes des « corps parlants ». Juste le contraire de qu’on institue encore trop souvent en classe : des « esprits muets », des enfants-troncs, assignés à l’écoute tranquille ou à la répétition obséquieuse. Pourtant, les pédagogues répètent, depuis bien longtemps, que le corps et le langage sont au cœur de toute pédagogie qui associe transmission et émancipation…

Beaucoup de choses ont été dites là-dessus, de Pestalozzi à Freinet, de Makarenko à Oury, de la « classe atelier » aux « ateliers philo », des « situations problèmes » à la « pédagogie de projet »… Il est urgent que ces œuvres retrouvent leur place dans les rayons de nos librairies !
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Re: L'enseignement civique et les clichés sexistes

Messagepar locipompeiani » 16 Septembre 2015, 08:30

Des polémiques qui révèlent qu'il n'est pas si facile de prêcher un catéchisme laïc !

Des cours d'enseignement civique où les élèves doivent lister dans un tableau les caractéristiques des hommes et celles des femmes.

François Jarraud a écrit:
« Panique au ministère sur l'EMC et le genre...
La bataille sur le genre a-t-elle laissé des traces si durables ? Il aura suffi d'une émission de RTL et d'une malheureuse fiche de travail de collège en EMC pour amener le ministère à réagir immédiatement et modifier et remodifier la fiche en question.
Sur RTL, le vice-président du Snalc ( !) critique un des documents de travail proposés par la Dgesco pour le nouveau programme d'EMC au collège sur les stéréotypes sexistes. Selon lui, l'exercice "perpétue des clichés sexistes". Cela lui permet de dénoncer un programme vide et chronophage. »


Aussitôt le ministère réagit et modifie à deux reprises la fiche pour clarifier les consignes. Il se justifie en arguant que demander aux élèves d’identifier les caractéristiques « masculines » et « féminines » de chacun des personnages, c’est justement permettre aux élèves d’identifier ces stéréotypes encore très présents. On avait peut-être voulu éviter de réveiller la querelle du genre qui a agité les milieux traditionnalistes il y a plus d’un an.
Éducation : quand le cours d'enseignement civique perpétue des clichés sexistes


RTL


La fiche d’Eduscol La fiche d’Eduscol

Les ressources EMC de la Dgesco
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EMC : quelques exemples de fiches

Messagepar locipompeiani » 16 Septembre 2015, 16:38

Des conseils de mise en œuvre pour le débat

Trois démarches apparaissent possibles pour amener les élèves à exprimer et étayer une position dans le débat : ils choisissent leur propre opinion, ils défendent une opinion tirée au sort, ils assument l’opinion d’une catégorie d’acteurs dans un jeu de rôles. S’il faut apprendre à prendre position, il est également important, via un processus d’empathie, de développer des capacités d’agilité intellectuelle, de respect de la pluralité des points de vue et de partage de son ressenti personnel voire de ses émotions. Etre obligé d’argumenter une autre position que la sienne tout comme s’insérer dans un jeu de rôles aident également à la décentration et à la mise à distance.
Le rôle de l’animateur (enseignant, CPE, AED, etc.) peut varier selon les situations, les cycles et les niveaux. L’animateur favorise les échanges entre les élèves et s’exprime donc le moins possible. Il observe et prend de l’information sur les compétences mises en œuvre par les élèves afin d’identifier les difficultés et pouvoir ensuite en faire un objet de travail et de progression, voire un métadébat. Il peut assurer le rôle du modérateur, guider le débat et intervenir au cours des échanges pour identifier les notions en jeu en partant des apports des élèves ; il peut suppléer ponctuellement le(s) modérateur(s)-élève(s) en cas de difficulté ; il intervient si nécessaire pour signaler tout argument non recevable du point de vue des valeurs (il peut choisir d’interrompre le débat si nécessaire).
Un bilan réflexif est nécessaire pour insérer la séquence dans une progressivité et favoriser l’appropriation des valeurs dans leurs dimensions cognitive, affective et comportementale. Il peut s’appuyer sur une auto-évaluation individuelle confrontée ensuite aux retours des élèves auxquels on a assigné le rôle d’évaluateurs et à ceux de l’ensemble du groupe en vue de l’élaboration d’un bilan collectif. Ce bilan doit être constructif et comporter des éléments liés aux compétences mobilisées dans le débat mais également des éléments d’institutionnalisation des savoirs en jeu.
D’autres modalités que celle du débat contradictoire classique avec sa variante « jeu de rôles » sontégalement envisageables. Les conditions de réussite demeurent les mêmes

Les quatre coins
Les élèves sont confrontés à une affirmation et doivent se positionner dans un des quatre coins de la salle de classe selon qu’ils sont « tout à fait d’accord », « plutôt d’accord », « plutôt pas d’accord » ou « pas d’accord du tout ». Chaque groupe travaille ensuite à la construction d’un argumentaire à l’appui du point de vue choisi. Une fois ces argumentaires présentés à l’oral (désigner un ou plusieurs rapporteurs si nécessaire), les élèves peuvent décider de changer leur position initiale.
Chaque groupe rédige ensuite une synthèse présentant les quatre arguments les plus importants à l’appui de son point de vue. Ce type de débat peut être particulièrement pertinent pour faire émerger des représentations et travailler à leur mise à distance.

Le bocal
La classe est divisée en trois groupes : deux groupes « d’experts » (qui ont chacun travaillé un argumentaire pour étayer un point de vue, assigné ou choisi, sur la question débattue) et un troisième groupe d’élèves « auditeurs ». Les chaises sont réparties en deux cercles concentriques (le premier cercle constitue le « bocal » où ont lieu les échanges ; le cercle extérieur est occupé par le reste de la classe).
Les deux groupes « d’experts » se succèdent d’abord dans le « bocal » pour présenter leurs arguments et les affiner par la discussion. C’est ensuite au tour des élèves « auditeurs » de pouvoir occuper le « bocal » pour réagir aux arguments présentés par les « experts ». Cette succession être répétée plusieurs fois (on peut diviser le débat en familles d’arguments ou l’orienter en fonction de l’évolution des argumentaires). Une variante consiste à former le « bocal » avec 10 chaises, 3 pour chaque groupe d’élèves « experts » et 4 pour les élèves « auditeurs ». Les 6 élèves « experts » présentent leur argumentaire, avec une phase de réfutation, puis restent dans le « bocal » tout au long du débat. Des élèves « auditeurs » peuvent se succéder pour intervenir sur 3 des 4 chaises

Les dilemmes moraux


Un court scénario avec un protagoniste X, confronté à un choix. Ce scénario s’achève sur une question normative : que devrait faire X ? issue A / issue B. L’élève doit choisir entre les deux issues et justifier son choix.
Le prototype du dilemme moral est le dilemme de Heinz, formalisé par Lawrence Kolhberg :
« La femme de Heinz est très malade. Elle peut mourir d’un instant à l’autre si elle ne prend pas un médicament X. Celui-ci est hors de prix et Heinz ne peut le payer. Il se rend néanmoins chez un pharmacien et lui demande le médicament, ne serait-ce qu’à crédit. Le pharmacien refuse. »

Que devrait faire Heinz ? Laisser mourir sa femme ou voler le médicament ?

Enjeux pour l’EMC

L’objectif de la méthode des dilemmes moraux est de faire croître l’autonomie morale des élèves, de leur apprendre à développer leur capacité à juger par eux-mêmes. Inspirée des théories du développement moral de Lawrence Kohlberg, elle permet de découvrir, dans le cadre de la discussion, des conflits d’obligation et d’appréhender la hiérarchisation des normes. Elle vise aussi le respect du pluralisme des opinions dans le cadre d’une société démocratique, tout en rappelant que la loi civile en est la garantie. La pratique des dilemmes moraux s’inscrit enfin dans le cadre d’une discussion fondée sur l’empathie et l’écoute mutuelle, en liant étroitement et explicitement compétences langagières et morales.

Conditions de réussite
Tenir compte du stade de développement moral des élèves : l’élève doit pouvoir s’identifier au personnage central par empathie. La situation proposée doit être adaptée à l’âge des élèves et entrer directement en résonance avec l’univers de l’apprenant.
• Respecter trois critères formels : un court scénario avec un personnage principal ; une question exprimée ou sous-entendue, en terme de devoir, de préférence au mode conditionnel ou à défaut au mode indicatif, et faisant appel au jugement ; un choix et une justification demandés à l’élève.
◦ Le dilemme moral ne se réduit pas à un choix restreint comme dans l’alternative (« faut-il faire ceci ou cela ? »). Il n’y a pas en effet de dissonance cognitive dans l’alternative et donc pas de développement du discernement.
◦ La question est rédigée en terme de devoir mais elle ne s’applique pas à l’agir moral : elle s’applique au jugement moral (ce qu’il faudrait faire, même si l’on ne se sent pas capable de le faire).
• Penser à varier les types de textes et la présentation par la pratique théâtrale, le mime, le conte, les jeux de rôles…
• Le rôle de l’enseignant : il veille au bon déroulement de la discussion et de l’argumentation qui permettent le développement moral. Il aide à penser et ne pense pas à la place de l’élève, même si le raisonnement lui semble limité. Si certains élèves refusent d’être enfermés dans le dilemme, il leur faut au moins justifier les raisons qu’ils ont à ne pas vouloir ou pouvoir choisir.
• Articulation et complémentarité avec d’autres pratiques pédagogiques : le débat, la discussion à visée philosophique (DVP) et la méthode de la clarification des valeurs qui se donne pour objectif la justification des préférences personnelles. Les dilemmes moraux visent en particulier à mettre en évidence que le choix moral implique la relation aux autres et aux lois de la société, où la norme peut obliger les autres autant qu’elle oblige le sujet. La DVP, la méthode de la clarification des valeurs et le dispositif pédagogique des dilemmes moraux sont ainsi complémentaires dans la construction des compétences morales spécifiques.
Bien cordialement,
Patricia Carles
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Des rats dans un bocal?

Messagepar locipompeiani » 18 Septembre 2015, 15:58

A propos de l’EMC et des préconisations du Ministère

Amputer les horaires d’enseignement pour instituer un cours de morale me semble totalement contreproductif. Les cours d’une heure (sauf peut-être le dessin et la musique en raison de leur spécificité) ne sont jamais pris au sérieux par les élèves, qui sont très rétifs par ailleurs aux « leçons de morale »

Qui plus est, il me semble que ces directives visent, comme beaucoup d’autres, à transformer le professeur en exécutant servile d’une pédagogie prémâchée.
Le professeur doit rester « l’auteur de son cours ». Il peut inciter à la réflexion critique à partir du champ disciplinaire qui est le sien. La littérature et l’histoire fournissent amplement matière à la réflexion sur les valeurs que l’on veut transmettre sans qu’il soit besoin de recourir à Lawrence Kohlberg !

Encore une fois, nos « pédagogistes » font preuve de leur inculture abyssale : le dilemme d’Antigone (Sophocle, Anouilh), celui de Thomas d’Aquin (le vol alimentaire), le cas de conscience des Horaces, la casuistique des pères jésuites valent largement le dilemme de Heinz !
La démarche de Lawrence Kohlberg vise d’ailleurs à mesurer la répartition des jugements moraux dans une population d’enfants en fonction de leur âge mental ; elle n’est pas destinée à l’apprentissage de la morale dont elle présuppose la légitimité.

De quoi s’agit-il donc ? S’agit-il de transformer les enseignants en auxiliaires d’un laboratoire de psychologie expérimentale ? Encore une fois on confond analyse descriptive et démarche prescriptive.

Les jeux de rôles préconisés visent à façonner des comportements : ils relèvent plus du conditionnement que de l’enseignement. Ce n’est pas en mettant les élèves dans un « bocal », comme des rats de laboratoire, qu’on forme des citoyens libres et responsables !
Bien cordialement,
Patricia Carles
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