par locipompeiani » 04 Mars 2019, 15:54
Miró - Rétrospective au Grand Palais Vidéo YouTube
Le parcours de l’exposition suit le cheminement de l’artiste de ses débuts en Catalogne jusqu’à son œuvre ultime où l’élan créateur le pousse à affronter avec toujours plus de liberté la matérialité de la toile.
Le tableau « Nord-Sud » a valeur programmatique. Son titre reprend celui d’une revue française créée par le poète Pierre Reverdy et révèle d’emblée les affinités entre l’œuvre picturale et la littérature. Nord-Sud désigne aussi l’axe Montmartre-Montparnasse reliant les deux pôles de la vie artistique parisienne ou l’axe Paris-Barcelone. C’est d’ailleurs à Barcelone, à la galerie Dalmau, que Miró a découvert fauves et cubistes qui inspirent la toile de 1916 « La Rose » où l’on retrouve la touche de Cézanne, la fragmentation du sujet chère aux cubistes et les contrastes de couleurs du fauvisme (les rouges voisinant avec les verts clairs et les roses tendres)
Les premiers sujets du « Fauve catalan » (comme il se plaisait lui-même à se désigner) sont essentiellement puisés dans les environs du village de Mont-Roig. Du fauvisme Miró retient la valeur expressive de la couleur qu’il met au service d’un lyrisme personnel exubérant. Dans les quatre paysages peints à Mont-Roig au cours de l’été 1918, il s’écarte cependant de l’influence fauviste pour tenter de traduire la vie interne des éléments les plus infimes de la nature (brindilles, feuilles, cailloux). Cette nouvelle démarche, proche du travail du calligraphe, reflète l’intérêt de Miro pour les miniatures persanes admirées chez Dalmau. Il trouve dans ce terroir inondé de lumière les éléments (ciel, soleil, lune) qui lui permettront de créer un nouveau langage plastique.
Si Miró reprend, dans certaines toiles des années 1916-1919, le découpage des plans en facettes, le basculement des perspectives et la multiplication des points de vue chers à Picasso ou à Braque, il ne se laisse enfermer dans aucune école et revendique aussi bien l’influence de Van Gogh ou de Cézanne que celle de l’art catalan ou du futurisme italien.
« Le Carnaval d’Arlequin » déploie les motifs favoris de son répertoire iconographique : l’échelle – « celle de la fuite, de l’évasion, mais aussi de l’élévation » -, les insectes, la sphère, « représentation du globe terrestre », le chat, qui ne quitte jamais son atelier, et le triangle noir, symbole de la Tour Eiffel.
« Les Paysages imaginaires » témoignent de sa rencontre avec ses amis écrivains (Leiris, Bataille, Desnos, Artaud, Queneau …). Il découvre alors un univers poétique qui le libère des carcans de la tradition. Avec le surréalisme, les éléments du réel se métamorphosent désormais en un système de signes qui renvoient au potentiel lyrique des objets et plongent le spectateur au cœur d’un cosmos secret.
Dans les « Peintures de rêve », Miró poursuit sa révolution artistique, ne laissant plus flotter sur une toile brossée d’un seul élan que des taches informes, des couleurs éparses, des figures fantômes.
Dès 1935, face à la montée des fascismes, le cycle des « peintures sauvages » fait surgir paysages nocturnes angoissants et figures aux faciès grimaçants. Les peintures sur masonite (Isorel) prolongent ce climat d’épouvante avec leurs signes sommaires et leurs motifs oniriques, comme échappés de l’inconscient du peintre.
Avec « Les Constellations », exécutées de 1939 à 1941, Miró expérimente des textures nouvelles, support idéal pour inventer un nouveau langage pictural, une combinatoire originale de pictogrammes dynamiques et colorés. Les œuvres d’après-guerre porteront ce système aux confins de l’abstraction.
Le parcours s’achève sur les céramiques, les sculptures, le travail d’illustration et l’univers enchanté des dernières toiles.
Bien cordialement,
Patricia Carles