Bonjour à tous !
Je ne sais pas si ce forum est le bon endroit pour cette requête, mais je me lance quand même !
Voilà, je ne suis ni latiniste ni helléniste, mais la civilisation et l'histoire grecque et romaine m'intéressent énormément. Après César (Jules), Hérodote, Polybe, Thucydide, Xenophon, Salluste, Plutarque, j'ai eu envie de me risquer à Juvénal, tenté par ses satires. Je n'ai jamais eu jusqu'à présent à me plaindre des traductions, mais la version de Juvénal que j'ai me déplait. Le traducteur (Claude-André Tabart pour nrf/Gallimard) mêle au texte qui me semble pourtant assez percutant des références et du vocabulaire anachronique (St Just au lieu des Gracques, Biribi pour une prison) et modernisé et vulgarisé à outrance (fric, oseille, caisse, damer le pion, etc.) Ce n'est pas ce que je cherche : je préfère une traduction proche du texte, même couturée de notes et de renvois s'il faut tout ça pour expliquer le contexte et l'intention. Je cherche aussi une traduction qui ne serait pas trop aseptisée ou expurgée des outrances Juvénaliennes.
Par exemple, ce passage
« Cum te summoveant qui testamenta merentur
Noctibus, in coelum quos evehit, optima summi
Nunc via processus, vetulæ vesica beatæ ? » est rendu
par L.V. Raoul (1812) :
« Quand il nous faut céder nos droits héréditaires
À ces gens que, pour prix de leurs nuits mercenaires,
Une vieille opulente élève jusqu’aux cieux ? »
par V. Fabre de Narbonne (1825) :
« Verrai-je de sang froid un vigoureux mortel
Par la vieille opulence élevé jusqu’au ciel,
Chaque nuit méritant une marque d’estime,
Rayer d’un testament l’héritier légitime ? »
par Jules Lacroix :
« Lorsqu’on est supplanté par d’ignobles amants
Dont les honteuses nuits gagnent des testaments,
Et qui, du sein ridé d’une vieille opulente,
Élèvent jusqu’aux cieux leur fortune insolente! »
par Olivier Sers (traduction moderne) :
« Ou en devant céder le passage à ceux qui gagnent des héritages la nuit, qui montent au ciel en enfilant le raccourci moderne de la réussite et de la fortune, le cul cossu d'une vielle belle ? »
et Claude-André Tabart (traduction moderne) :
« Il te faut t'effacer devant ceux qui recueillent
Des testaments sur l'oreiller, ceux qu'élève jusqu'au pinacle
La route la plus sûre à l'époque où nous sommes :
Le vagin d'une riche vielle ! »
Cinq traductions qui pour la plupart (sauf celle de Fabre de Narbonne qui est incompréhensible de prude hermétisme !) arrivent à véhiculer une idée moyenne mais avec des effets très différents (je crois que je préfère la version de Jules Lacroix).
Voilà, donc si vous pouvez me citer LA traduction idéale de Juvénal, classique, détaillée, bien annotée, et respectant l'esprit de la satire, eh bien... merci !